Le paysage littéraire national s’est enrichi d’un nouveau roman intitulé Musungu Cappuccino, de l’auteur gabonais Marcel Nguiayo Effam. Certes, l’ouvrage a été publié il y a déjà quelque temps, mais il semblerait que ce soit seulement maintenant que son auteur le soumette à l’offre publique de lecture. À y regarder de près, cet écrivain pour le moins atypique qui se fait appeler l’écririen, nous apparaît comme une comète isolée dans la sphère littéraire locale ; laquelle sans trop nous avancer, paraît en ébullition grâce aux possibilités d’édition que permettent les nouvelles technologies de l’information et de la communication.
En effet, depuis les années 2000, il ne se passe pas un trimestre, voire un semestre sans que l’on enregistre l’arrivée d’un ou d’une nouvelle autrice. Et parmi la foisonnante publication que cela cause inévitablement, nous sommes parfois au regret de souligner la médiocrité d’un certain nombre de livres. Mais, si la quantité finit par engendrer la qualité, l’auteur Marcel Nguiayo Effam semble s’inscrire dans la logique du temps, du travail patient, et de la qualité au détriment de la quantité. Il publie peu, s’affiche peu dans les médias et brille par une certaine originalité. Son dernier ouvrage aux éditions Ona relate l’histoire d’une jeune fille née par miracle que le sort a doté d’intelligence, qui doit faire face à la jalousie des membres de sa famille, et qui devra trouver le moyen d’exister autrement que comme un objet épinglé par les autres.
Dans un style clair et un rythme soutenu, l’auteur nous conduit dans le cerveau de son héroïne. Il nous fait entrer dans les secrets de son cœur et, dans un formidable jeu de faux semblant, nous amène à douter de la nature bienveillante de Grâce Bassanga, le personnage principal. Grâce nous emporte avec elle dans sa folie, puis elle nous laisse pantois devant le choix qui s’offre à elle : vaut-il mieux subir le mal ou le causer ? Le récit évoque bien sûr d’autres questions qui touchent à notre sensibilité, et aux rapports que nous avons avec notre environnement. On est loin du roman d’amour, mais il faut noter que ce sentiment imprègne tout le récit, donne sa forme à la narration et révèle sa toute-puissance à la fin ; une chute que nous tairons pour inciter le lecteur à se procurer le livre de cet écririen.
Le roman compte 137 pages qui se lisent facilement. Il est illustré magnifiquement par la maison Ona, laquelle prouve ici tout son talent, avec une première de couverture qui suscite la curiosité. Le titre sonne et sonne comme une intrigue ; et nous nous inclinons devant l’inspiration de ce créateur qui, nous nous en souvenons encore, avait bousculé la toile littéraire nationale avec son célèbre recueil de nouvelles « Si je mens, je baise ma mère ». Pour finir, nous soulignons une quatrième de couverture sobre et professionnelle. Ici, nous mentionnons le fait non moins anodin, que l’auteur ait délibérément choisi de ne pas s’afficher, dans un spectre littéraire où tout le monde se montre dans les réseaux et où le moindre écrivaillon se proclame écrivain. Nous souhaitons bon vent à Musungu Cappuccino et attendons avec impatience le moment où son auteur nous expliquera ce titre surprenant.
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