La prolifération des églises dites éveillées au Gabon et particulièrement à Libreville est un problème qui se pose de plus en plus avec acuité. Les habitants vraisemblablement ne sont pas contre les églises, mais plutôt contre des agissements dont se rendent coupables certains hommes de Dieu.
Jadis, La vocation traditionnelle de l’église était de moraliser la société, servir d’aiguillon pour des causes nobles. Malheureusement, beaucoup d’églises se sont éloignées de cette vocation…
Pour Fabrice, jeune étudiant gabonais « l’église serait un lieu où les gens qui ont compris qu’il y’a un créateur, jésus christ, qui a donné sa vie pour sauver le monde entier se réunissent pour prier en son nom… » Pour Ariane, commerçante à Libreville « l’église est le refuge de ceux qui ont déçu le monde ou qui ont été déçu par le monde »
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« Rares sont les quartiers de Libreville et ses environs où on ne dénombre pas une demi-douzaine d’églises ou lieux de cultes chrétiens» s’indigne Frédéric, un responsable d’une église évangélique.
Cette myriade d’églises d’inspiration chrétienne affiche une richesse insolente. Elles exploitent le désœuvrement de bon nombre de nos compatriotes et leur promettent, en échange bien sûr de dons réguliers, des jours enfin meilleurs. « Si vous donnez 5 francs, vous en recevrez 500 en retour ! » Tel est le slogan
Pour certains chrétiens apparemment avertis, la prolifération des églises n’est que la manifestation des prophéties bibliques qui prévoyaient l’arrivée de faux prophètes aux derniers moments de la vie terrestre. «Ces églises ont une seule mission, celle de conquérir des âmes pour le malin, le diable». Contrairement à l’explication doctrinale, Clément, quant à lui estime que l’origine de la prolifération des églises réside dans les complaintes et les souffrances quotidiennes des Gabonais qui sont toujours à la recherche de l’effet magique. «Beaucoup d’individus créent des églises pour s’enrichir sur la base de la misère des gens à la recherchent d’une hypothétique solution aux problèmes sociaux» a-t-il vigoureusement martelé
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Plus cartésien que les philosophes, il interroge «Pourquoi invite –t- on les gens à venir aux séminaires de prières avec insistance sur la délivrance, la richesse, la guérison, bref tout ce qui est incitatif?». A l’en croire, « c’est un appât pour gruger ceux qui s’y rendront et qui à coup sûr paieront des quêtes, des dîmes, voire des objets dits bénis». Emparé d’un vent de modération, Clément ajoute « toutefois on en dénombre qui sont de vraies églises. On les voit souvent actives et près des plus démunis, leur apportant des soutiens matériels et financiers». Plus satyrique que son prédécesseur, Roger Koumba, dénonce : « les églises font plus de ravages économiques que les structures illégales de placement d’argent». «Elles poussent comme des champignons et à chaque occasion amassent d’argent sans pour autant verser des contreparties », explique-il. De même que Clément, il reste ouvert à la laïcité mais, dit-il «l’Etat doit réglementer la création d’église. N’importe qui sous prétexte d’avoir reçu un appel de Dieu ne peut pas en créer».
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La multiplicité des églises « devrait permettre d’avoir plus de personnes acquises à la cause de Dieu, mais bien au contraire nous constatons partout un recul moral », se désole Julien. «Je ne suis d’aucun bord religieux, parce que je ne sais pas qui dit la vérité », ajoute-t-il. Et comme Julien, nombreux sont ceux qui se posent cette question lancinante : «Qui croire?». La crédibilité n’est plus de mise et un jeune fonctionnaire qui a requis l’anonymat en sait quelque chose en témoigne : «Ma femme à la recherche d’une solution à notre vie de couple infructueuse, allait régulièrement donner nos biens matériels et financiers en guise d’action de grâce. Quand j’y ai à un moment donné affiché ma désapprobation cela a dégénéré et nous avons fini par divorcer, suite à des disputes successives. Aujourd’hui sans fréquenter une quelconque église, j’ai une femme et des enfants pendant que mon ex passe encore d’église en église à la quête d’un partenaire », a-t-il témoigné. Il ajoute pour finir pour conclure : «Je reconnais qu’il y a un Dieu qui veille sur nous, mais il n’est pas où les naïfs vont le chercher ».
Le pasteur Philippe NZAMBA de l’Eglise Sainte des Apôtres de Jésus- Christ fait savoir que la multiplication des Eglises est bonne dans la mesure où elles remplissent leurs missions. « Il faut savoir que les églises sont créées pour enseigner la bonne nouvelle et aider le pays à lutter contre toutes sortes de maux comme la polygamie, la corruption, la consommation d’alcool, les vols, la prostitution .» L’homme de Dieu estime que le rôle des églises est d’aider le pays à éduquer les citoyens. « Elles doivent se mettre en coalitions pour combattre le diable. Tout cela, dans le but de construire le pays et le royaume de Dieu. »
Pasteur NZAMBA a déclaré qu’à cause des intérêts personnels des uns et des autres, l’objectif principal n’est pas atteint. De nombreux obstacles subsistent. Des malentendus, des divisions et d’autres problèmes naissent entre les fidèles de la même église. Certains veulent être au- dessus des autres et contrôler toutes les richesses de l’église. Des querelles naissent parfois entre pasteurs. Dans d’autres cas, les fidèles d’une église se détachent pour aller dans une autre. Le Pasteur NZAMBA interpelle les serviteurs de Dieu sur la nécessité de se mettre ensemble pour sauver les brebis égarés et être de bons exemples dans l’intérêt de l’église et dans du pays.
Pablo Guissamba/RAMA
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