Une exigence autrefois considérée comme une aberration se normalise insidieusement dans les offres d’emploi : le stagiaire avec plusieurs années d’expérience. Ce paradoxe sème la confusion et la frustration chez les jeunes diplômés et les personnes en reconversion, cherchant désespérément à mettre un pied sur le marché du travail.Les entreprises, soucieuses d’une productivité immédiate et d’une réduction des coûts salariaux, demandent de plus en plus aux candidats à un stage d’avoir déjà une expérience significative, parfois allant jusqu’à trois ou quatre ans.
Cette pratique dévie le stage de sa vocation première : l’apprentissage et l’acquisition d’une première expérience professionnelle. Elle devient une porte dérobée pour recruter une main-d’œuvre qualifiée à moindre coût, profitant d’un statut précaire.Face à cette dérive, le Pôle National de Promotion de l’Emploi (PNPE), dont la mission est de faciliter l’insertion professionnelle, semble se retrouver dans une position délicate. Bien que l’organisme déploie des efforts pour l’encadrement des demandeurs d’emploi et l’anticipation des besoins du marché, il ne dispose visiblement pas des outils réglementaires ou de la force de frappe suffisante pour endiguer efficacement cette exigence abusive.
Le résultat est un marché de l’emploi à deux vitesses : d’un côté, des entreprises qui élèvent le niveau d’exigence sans compensation salariale adéquate, et de l’autre, une jeunesse obligée de multiplier les stages, souvent peu ou pas rémunérés, pour accumuler l’expérience demandée, créant ainsi un cercle vicieux d’exploitation de la main-d’œuvre jeune et qualifiée. Sans une intervention plus ferme et une réaffirmation claire du rôle formateur du stage, ce « stage expérimenté » risque de devenir la norme, pénalisant durablement l’accès à l’emploi pour les primo-demandeurs.


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