Les 7 et 8 juillet 2025, Libreville a vibré au rythme du Gabon Economic Forum, un événement majeur destiné à relancer l’économie nationale. Réunissant une mosaïque d’acteurs, allant des membres du gouvernement aux chefs d’entreprise, en passant par d’anciens hauts fonctionnaires et des experts, le forum avait pour ambition de débusquer les lacunes structurelles de l’économie gabonaise afin d’atteindre une croissance à deux chiffres.
Au cœur des débats, un témoignage a particulièrement marqué les esprits : celui de Jean Marie Ogandaga, ancien ministre de l’Économie et des Finances sous Ali Bongo. Brise le silence, il a courageusement levé le voile sur les entraves systémiques qui ont miné son action, dénonçant des pratiques internes ayant saboté de nombreuses initiatives stratégiques de l’État.
Des révélations inédites sur des dysfonctionnements cachés:
Visiblement libéré, Ogandaga a expliqué les raisons de son long silence. « Autrefois, on m’avait dit, un ministre, ça la boucle ou ça démissionne. Et évidemment, comme vous le savez, j’ai démissionné. Mais aujourd’hui, je peux parler », a-t-il affirmé.Il a ensuite mis en garde les nouvelles autorités contre la reproduction de ces schémas destructeurs. « Quand j’entends parler de la dette, sincèrement, je ne souhaite pas que les nouvelles autorités fassent ce que nous avons vécu, où des gouvernements entiers ont été mis en échec par des personnes qui n’avaient aucune responsabilité gouvernementale ».
Ces propos soulignent l’impact dévastateur des interférences non institutionnelles sur l’efficacité gouvernementale.Jean Marie Ogandaga, qui a dirigé le ministère de l’Économie et des Finances de 2018 à 2020, a étayé ses dires par des exemples concrets de ces sabotages internes. Il a notamment évoqué l’existence de « saboteurs de l’intérieur » capables de bloquer le décaissement de fonds pourtant validés par les plus hautes sphères de l’État.Il a cité un incident où une personne non identifiée a bloqué un paiement de la dette intérieure, pourtant décidé par le ministre des Finances lui-même.
Un autre exemple frappant s’est produit lors de négociations cruciales avec le FMI : un virement urgent a été bloqué à Libreville, compromettant sérieusement les discussions. Pour débloquer la situation, M. Ogandaga a été contraint de solliciter l’aide d’un opérateur économique, une illustration édifiante de l’ampleur de cette ingérence.Un autre scandale mis en lumière concerne un prêt de la Banque africaine de développement (BAD) de plus de 87 milliards de FCFA, alloué au bitumage d’une route vers Doussala. « Il y a une personne qui décide que la route n’ira pas là-bas », a-t-il révélé. Conséquence ?
Le projet a été annulé, et le Gabon a néanmoins dû s’acquitter des frais de non-tirage des fonds.Ces révélations percutantes mettent en évidence l’urgence pour le Gabon d’engager une réforme profonde de ses modes de gouvernance. Pour que les nouvelles autorités puissent véritablement transformer le pays, il est impératif d’éliminer les conflits d’intérêts et de mettre fin à la personnalisation de la chose publique, qui nuit gravement à l’intérêt général.
La Rédaction
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